Charlotte PARMENTIER-LECOCQ, Carole GRANDJEAN, Christophe CASTANER, Fadila KHATTABI et plusieurs de leurs collègues députés ont constaté que l’ensemble des rapports récents sur la santé au travail "partagent un même constat : le dispositif de suivi de la santé au travail et de la prévention des risques professionnels doit s’intégrer plus largement dans notre politique de santé publique". Ils estiment qu’il "convient aujourd’hui de réorienter les priorités et les moyens de ces dispositifs" et ont déposé à l'Assemblée nationale une proposition de loi en ce sens le 23 décembre 2020.
Pour la rédaction de ce texte, ses auteurs "se sont saisis du contenu de [l’]accord national interprofessionnel [(ANI) du 9 décembre 2020 sur la santé au travail], afin d’assurer sa transposition et sa mise en vigueur". Cet accord leur apparaît en effet "comme une réelle avancée vers un système de prévention plutôt que de réparation et permet d’améliorer les dispositifs existants, notamment pour les moyennes et petites entreprises".
Le texte transmis au Sénat le 17 février 2021 prévoit notamment :
. Pour renforcer la prévention au sein des entreprises et décloisonner la santé publique et la santé au travail (art. 1 à 7) :
- d’aligner la définition du harcèlement sexuel au travail sur la définition pénale générale et de changer la dénomination des services de santé au travail en : "service de prévention et de santé au travail" (art. 1er) ;
- d’améliorer les conditions d’élaboration, d’accessibilité et de conservation du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) (art. 2) ;
- de créer un passeport de prévention recensant les formations à la santé et à la sécurité au travail suivies par le travailleur (art. 3) ;
- d’étendre les missions des services de prévention et de santé au travail à l’évaluation et à la prévention des risques professionnels dans l’entreprise, ainsi qu’aux actions de promotion de la santé sur le lieu de travail, dont des campagnes de vaccination et de dépistage (art. 4) ;
- d’intégrer le médecin du travail dans les communautés professionnelles territoriales de santé, afin qu’il soit partie prenante du parcours de soins (art. 5).
. Pour définir l’offre de services à fournir par les services de prévention et de santé au travail aux entreprises et aux salariés (art. 8 à 13) :
- de mettre en place une offre socle obligatoire et une offre complémentaire, proposées par les services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) ainsi qu'une procédure de certification de ces services (art. 8) ;
- d'améliorer la transparence de la tarification des SPSTI (art. 9)
- de permettre aux professionnels de santé du service de prévention et de santé au travail d'accéder au dossier médical partagé (DMP) avec l'accord du travailleur (art.11) et de faciliter et de sécuriser l’accès des professionnels de santé de ville ou hospitaliers au dossier médical en santé au travail (DMST) (art. 12) ;
- d’intégrer dans le système national de données de santé celles qui sont issues du dossier médical en santé au travail (art. 13).
. Pour mieux accompagner certains publics, notamment vulnérables, et lutter contre la désinsertion professionnelle (art. 14 à 19) :
- de créer une cellule de prévention de la désinsertion professionnelle au sein de chaque SPSTI (art. 14) ;
- d’améliorer le partage d’informations entre les organismes de l’assurance maladie et les services de prévention et de santé au travail (SPST), en particulier pour identifier les assurés en arrêt de travail qui présentent un risque d’éloignement de l’emploi (art. 14 bis) ;
- de développer le recours à la télémédecine pour le suivi individuel du travailleur, sous réserve de son accord (art. 15) ;
- d’instaurer une visite médicale de mi-carrière au bénéfice des travailleurs (art. 16) ;
- de permettre le suivi de l'ensemble des travailleurs intervenant sur le site d'une entreprise par son propre service de prévention et de santé au travail (art. 17) ;
- d'aménager les modalités de suivi du salarié reprenant le travail après un arrêt lon (art. 18).
. Pour réorganiser la gouvernance de la prévention et de la santé au travail en renforçant la place des représentants des salariés (art. 20 à 28) :
- de faire évoluer la gouvernance des services de prévention et de santé au travail (art. 20) ;
- d’autoriser le médecin de ville, moyennant la détention d’une formation en médecine du travail, à contribuer, en lien avec le médecin du travail, au suivi de l’état de santé des travailleurs qui ne font pas l’objet d’un suivi renforcé (art. 21) ;
- de poser le principe selon lequel un tiers du temps de travail du médecin du travail doit être consacré aux actions sur le terrain en milieu de travail (art. 22) ;
- d'inscrire dans la loi le statut de l’infirmier en santé au travail, qui doit disposer d’une formation adaptée, et de l'autoriser à exercer en pratique avancée (art. 23) ;
- de créer un comité national de prévention et de santé au travail au sein du conseil d'orientation des conditions de travail (art. 25) ;
- d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de regrouper les associations régionales pour l'amélioration des conditions de travail au sein de l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (art. 27) ;
- de prévoir de nouvelles obligations en matière de formation des membres des délégations du personnel du comité social et économique en santé, sécurité et conditions de travail (art. 28).
Les auteurs de la proposition de loi prévoient que celle-ci entrera en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 31 mars 2022 (art. 29).
Le Gouvernement ayant engagé la procédure accélérée sur la proposition de loi le 2 février 2021, le texte pourrait ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement.