Deux projets de loi examinés en procédure accélérée, malgré l’opposition du Sénat
Le 24 janvier 2020, le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale un projet de loi organique relatif au système universel de retraite (PJLO - comprenant 5 articles) et un projet de loi instituant un système universel de retraite
(PJL - qui contient 65 articles). Il présente ces deux textes comme proposant "un cadre commun à tous les Français et [qui] construisent un régime tout à la fois pérenne, solide, qui renforce l’équité entre les générations, protège mieux les plus fragiles, restaure la confiance et redonne de la valeur au travail".
Le Gouvernement ayant engagé une procédure accélérée sur ces deux textes le 24 janvier 2020, ceux-ci pourraient ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement. Le 28 janvier, la Conférence des présidents du Sénat a décidé de s'opposer à l'engagement de la procédure accélérée sur le PJLO et le PJL. La Conférence des présidents de l'Assemblée, dont l'accord était nécessaire, a cependant refusé in fine la demande du Sénat.
Un système universel de retraite par points, financé par une cotisation sociale assise sur les revenus d’activité
Le dispositif proposé vise à appliquer le système universel de retraite à tous les travailleurs nés après 1975 (art 2 du PJL), les salariés du régime général, les travailleurs indépendants (art 4 du PJL), les salariés et exploitants agricoles (art 5 du PJL), les fonctionnaires, magistrats et militaires (art 6 du PJL), les assurés qui relèvent aujourd’hui de régimes spéciaux (art 7 du PJL) ainsi que les pouvoirs publics relevant aujourd’hui de régimes dérogatoires et notamment les députés et sénateurs (art 3 PJLO).
Le Gouvernement souhaite mettre en place un régime de retraites par points (articles 8 à 12 du PJL) : les points étant acquis en contrepartie du versement des cotisations retraite au titre d’une d’activité professionnelle. Une valeur d’acquisition des points est fixée chaque année. En outre, des points sont accordés :
- au cours de périodes de maternité, de maladie, de chômage et de congés de proche aidant... ;
- en fin de carrière (droits familiaux, retraite minimale) ;
- au titre de certaines périodes marquant l’entrée dans la vie active (notamment certains stages ou périodes de service civique) (art 47 du PJL) ;
- pour le rachat de points à tarif réduit au titre des années d’études supérieures (art 48 du PJL).
La pension du futur système serait calculée par le produit de la somme des points et de la valeur de service. Un mécanisme de bonus/malus fondé sur l’âge d’équilibre serait appliqué sur ce calcul (art 10 du PJL) ;
Ce "système universel de retraite [est] financé par une cotisation sociale assise sur les revenus d’activité" (art 13 du PJL). Des dispositions spécifiques sont prévues pour les salariés ou assimilés, contractuels du service public (art 15 du PJL), les artistes du spectacle, mannequins, journalistes et professions médicales exerçant à temps partiel pour le compte de plusieurs employeurs (art 16 du PJL), les fonctionnaires et salariés bénéficiant actuellement de régimes spéciaux (art 17 à 19 du PJL) et pour les travailleurs non-salariés (art 20 à 22 du PJL).
Le projet de loi initial prévoit que le système universel de retraite entrera en vigueur dès 2022 pour la génération 2004, et à partir de 2025 pour la génération 1975 (art 63 du PJL).
Un âge minimal de départ à la retraite fixé à 62 ans
L’article 23 du PJL dispose que "l’âge d’ouverture du droit à retraite est fixé à soixante-deux ans". Le projet de loi prévoit également :
- un cumul emploi-retraite (art 24 et 26 du PJL) ;
- l’extension du système de retraite progressive (art 25 du PJL) ;
- l’instauration d’un rachat de points (art 27 du PJL) ;
- la possibilité pour les travailleurs salariés ainsi que les fonctionnaires exerçant un emploi à temps partiel de cotiser sur la base d’une rémunération à temps plein (art 27 du PJL) ;
- le maintien du dispositif de carrières longues (art 28 du PJL) et de la possibilité d’un départ en retraite avant l’âge légal pour les assurés ayant effectué une carrière professionnelle en situation de handicap (art 29).
Des propositions en matière de pénibilité, de retraite minimale, de prise en compte des interruptions de carrière
En matière de pénibilité, de retraite minimale, de prise en compte des interruptions de carrière, le projet de loi prévoit notamment :
- l’extension à tous, sauf aux marins et militaires, du bénéfice du compte professionnel de prévention (C2P) (art 33 du PJL) ;
- des dispositions spécifiques pour les fonctionnaires qui concourent à des missions publiques de sécurité, de surveillance ou de contrôle (art 36 du PJL) et les militaires (art 37 du PJL) ;
- la mise en place d’un minimum de retraite accordé à compter de l’âge d’équilibre dont le montant minimum est constitué d’un montant de base et d’une majoration exprimés en pourcentage du montant mensuel du SMIC et fixés par décret (art 40 du PJL). Le Gouvernement prévoit de porter à 1 000 euros nets les pensions des assurés ayant effectué une carrière complète en 2022, et de garantir une retraite nette équivalente à 85 % du SMIC net à partir de 2025 ;
- un système de compensation de périodes d’interruption de carrière pour les périodes de congés maternité, congés maladies, d’invalidité, de chômage (art 42 du PJL) ;
- l’unification des règles relatives aux pensions de réversion (art 46 du PJL).
Mise en place d’une nouvelle gouvernance
Le Gouvernement souhaite créer un nouvel établissement public administratif qui aura pour mission d’assurer la gestion et le pilotage du système universel : la Caisse nationale de retraite universelle – CNRU (art 49 et 50 du PJL). Il propose un pilotage selon deux pluralités : un pilotage pluriannuel et la fixation annuelle des paramètres (art 55 du PJL). Une nouvelle instance serait également créée pour conforter le pilotage de long terme du système : le comité d’expertise indépendant de retraites.
Une conférence sur l’équilibre et le financement des retraites devra remettre ses conclusions d’ici la fin du mois d’avril 2020 concernant les mesures à prendre pour atteindre l’équilibre financier de l’assurance vieillesse en 2027 (art 57 du PJL).
Un nouveau Fonds de réserves universel sera mis en place au 1er janvier 2022 (art 60 du PJL).
Un recours aux ordonnances
Le PJL prévoit une série d’ordonnances ayant pour rôle de prépare la transition vers le nouveau système de conversion des droits acquis pour les personnes nées avant 1975.