Déposée au Sénat par Jean-Claude REQUIER et les membres du Groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, le 3 janvier 2018, cette proposition de loi propose de renforcer les dispositifs de prévention des potentiels conflits d'intérêts liés à la mobilité des hauts fonctionnaires, afin de garantir une meilleure transparence des évolutions de carrière et d’écarter tout risque de suspicion.
Rappelant que la mobilité est devenue une étape de carrière nécessaire dans la haute fonction publique au nom de la théorie de la "respiration" des grands corps de l'État, et que le "pantouflage" existe au moins depuis la création de l'École Nationale d'Administration, les auteurs de ce texte, considèrent en effet que cette pratique n'est pas sans risque pour l'intérêt général.
Ils soulignent ainsi que "le maintien hors de leur administration d'origine, pour des durées parfois indéterminées, de fonctionnaires bénéficiant durant la majeure partie de leur vie professionnelle du bénéfice d'un concours, représente un coût de gestion des ressources humaines important." En outre, il existe des risques potentiels de situation de conflits d'intérêts lorsque des personnes issues de la haute administration se retrouvent en situation de favoriser une entreprise ou une institution, soit dans l'espoir de négocier une embauche, soit, après leur retour dans l'administration, pour honorer leurs anciennes relations professionnelles.
Estimant enfin que les dispositions de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires visant à lutter contre les conflits d'intérêts ne sont pas suffisantes, ils proposent de modifier ou de compléter ainsi la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires :
- L'article 1er conditionne la recevabilité d'une demande d'un fonctionnaire souhaitant cesser définitivement ses fonctions à sa démission de la fonction publique ainsi qu'au respect de l'engagement décennal (le cas contraire, au remboursement de la pantoufle) préalablement à la saisie de la commission de déontologie ;
- L'article 2 vise à rendre obligatoire la saisine de la commission de déontologie pour les demandes de mobilité des fonctionnaires soumis à déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et à rendre automatique l'ouverture d'une procédure disciplinaire en cas de non-respect de l'avis d'incompatibilité ou de compatibilité avec réserve de la commission de déontologie ;
- L'article 3 vise à modifier la composition de la commission de déontologie, et prévoit une présidence tournante entre les trois ordres administratif, financier et judiciaire ;
- L'article 4 étend le contrôle exercé par la commission de déontologie à la compatibilité des fonctions exercées par les fonctionnaires réintégrés après leur mobilité dans le secteur privé ;
- L'article 5 vise à étendre le contrôle de la commission de déontologie à la nomination des secrétaires ou délégués généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes prévu par la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ;
- L'article 6 fixe une durée maximale à la situation de détachement d'un fonctionnaire ;
- L'article 7 vise à instaurer un régime semi-automatique de peine complémentaire d'interdiction d'exercer une fonction publique, en cas de condamnation pour les mêmes infractions que celles donnant lieu au prononcé d'une peine d'inéligibilité.