5035 Lire le billet de l’Espace presse
Cette proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale le 10 octobre 2013 par les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen et apparentés.
Elle vise à "faire prendre conscience que la prostitution est dans l’immense majorité des cas une violence à l’égard de personnes démunies et une exploitation des plus faibles par des proxénètes, qu’ils agissent de manière individuelle ou dans des réseaux réalisant des profits très élevés, la traite se cumulant souvent avec d’autres trafics". Elle s’inscrit dans le cadre de la politique de lutte contre les violences faites aux femmes et d’égalité entre les femmes et les hommes.
S’appuyant notamment sur un travail parlementaire conséquent (mission d’information de l’Assemblée nationale sur la prostitution en France de 2011, proposition de loi et proposition de résolution adoptées à l’unanimité par les députés en décembre 2011, proposition de loi sénatoriale adoptée au Sénat en mars 2013, travaux du groupe de travail de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale – mis en place novembre 2012), le texte comporte 4 chapitres.
Le chapitre Ier (article 1er) est relatif aux moyens d’enquête et de poursuite des auteurs de la traite des êtres humains et de proxénétisme. L’article 1er vise ainsi à renforcer la lutte contre les réseaux qui utilisent Internet pour organiser leur activité, en proposant, d’une part, que les fournisseurs d’accès Internet (FAI) et les hébergeurs de sites Internet concourent à la lutte contre la diffusion des infractions de traite des êtres humains, de proxénétisme et des infractions assimilées et, d’autre part, que les FAI empêchent, à la demande de l’autorité administrative, l’accès du public aux sites Internet hébergés à l’étranger dont le contenu contrevient à la législation française.
Le Chapitre II (articles 2 à 14) s’attache à la protection des victimes de la prostitution et prévoit la création d’un parcours de sortie de la prostitution. Il propose notamment :
- la mise en place, au sein des conseils départementaux de prévention de la délinquance, d’aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les dérives sectaires et les violences faites aux femmes, d’une instance chargée d’organiser et de coordonner l’action en faveur des victimes de la prostitution (article 2) ;
- la mise en place d’un parcours de sortie de la prostitution proposé aux victimes de la prostitution qui en font la demande auprès d’une association compétente et agréée à cet effet (article 3). Les bénéficiaires de ce parcours pourront bénéficier d’une remise totale ou partielle d’impôts directs, d’amende fiscale ou de frais de poursuite (article 5) ;
- la mise en place d’un fonds pour la prévention de la prostitution et l’accompagnement social et professionnel des personnes prostituées. Les ressources de ce fonds sont constituées par des crédits de l’État affectés à ces actions, des recettes provenant de la confiscation des biens et produits issus du proxénétisme et d’un prélèvement sur le produit des amendes forfaitaires prévues pour le recours à la prostitution (article 4) ;
- la modification de l’accès à un titre de séjour pour les personnes étrangères victimes de traite des êtres humains ou de proxénétisme (article 6) ;
- l’abrogation du délit de racolage prévu par l’article 225-10-1 du code pénal qui sanctionne les personnes prostituées (article 13).
Le chapitre III (article 15) traite de la prévention des pratiques prostitutionnelles et du recours à la prostitution, et inscrit ainsi la lutte contre la marchandisation des corps parmi les thématiques relevant de l’éducation à la sexualité.
Le chapitre IV (articles 16 et 17) est relatif à l’interdiction de l’achat d’un acte sexuel.
L’article 16 crée une contravention de cinquième classe sanctionnant le fait de "solliciter, d’accepter ou d’obtenir des relations de nature sexuelle d’une personne qui se livre à la prostitution" : une telle contravention est punie d’une amende de 1 500 euros et de 3 000 euros en cas de récidive.
L’article 17 crée une peine complémentaire visant à sanctionner le recours à la prostitution. Il crée également un stage de sensibilisation aux conditions d’exercice de la prostitution qui pourrait constituer une alternative aux poursuites.
Enfin, le chapitre VI (articles 18 à 21) comporte les dispositions finales liées à l’entrée en vigueur et à l’application de la loi. Parmi ces mesures figurent :
- l’obligation pour le Gouvernement de présenter, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi, un rapport portant évaluation de la généralisation du délit de recours à la prostitution, et examinant la situation sanitaire et sociale des personnes prostituées (article 18) ;
- les modalités d’application de la proposition de loi outre-mer (article 20).